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La lutte des Tunisiennes pour leurs droits, remonte à bien longtemps. Mais, cette lutte s’organise et s’institutionnalise dès le 19e siècle, lorsque les réformistes Arabes, nourris de certains principes de liberté puisés dans le Coran s’intéressent à la pensée des Lumières.

L’Histoire de la Tunisie se confond souvent avec le destin de ses femmes. De Alyssa jusqu’aux amazones des temps modernes, en passant par Lella Manoubia sainte patronne des faubourgs de Tunis, Fatma El Fehri, fondatrice de l’Université de Kairouan, ou encore la princesse Aziza Othmana, toutes les familles ont porté en leur sein, des femmes d’exception. Leurs noms tombent dans l’oubli, avec le passage du temps, mais leur ADN imprime le tissu social et le façonne, envers et contre tout.

Lutte féministe, les débuts d’un mouvement

La défense de la cause féminine fait ses premiers pas en Europe, en Turquie et en Égypte. En Tunisie, le ministre Kheir Eddine, figure majeure du mouvement réformiste tunisien, demande dès 1856, l’instruction des femmes et prône une conciliation des apports Occidentaux à l’Islam. Le contexte international était favorable à l’émancipation des femmes dans les pays Arabes et musulmans, bien que les conservateurs s’opposassent à des réformes aussi radicales que celles de Mustafa Kemal Atatürk, premier dirigeant d’un État musulman à adopter un régime républicain et laïc. Dès 1930, le syndicaliste et auteur tunisien, Tahar Haddad, soulève dans son ouvrage Notre Femme Aux Yeux De La Société Et De La Religion, la question du statut personnel des femmes auprès de l’opinion publique. Il défend une égalité totale entre les hommes et les femmes, y compris en matière d’héritage* , suscitant ainsi la colère des conservateurs.

* Le Coran, évoque une responsabilité morale et matérielle de l’homme envers sa famille. À l’exception du verset de la qiwama, tous les versets relatifs à la tutelle préconisent les notions de justice entre les fidèles, la co-responsabilité des parents, le partage au sein de la famille, indépendamment du genre. L’interprétation de la supériorité masculine semble relever davantage d’une instrumentalisation politique.

Cette colère sera également provoquée par un autre homme. Habib Bourguiba, premier président de la République Tunisienne. Il sera à l’origine de la promulgation du CSP (code du statut personnel) en 1956. Ce code, révolutionnaire pour l’époque mais resté figé dans le temps, remplaçait les tribunaux religieux par des instances séculières. Il accordait aux femmes le droit de demander le divorce, abolissant la répudiation, la polygamie, la contrainte matrimoniale, etc. Un an plus tard, la femme bénéficie du droit de vote et de l’éligibilité aux élections municipales**.

** Les tombes des deux leaders seront profanées après la révolution de 2011, par des extrémistes islamistes, vraisemblablement toujours opposées aux réformes proposées et établies par les deux hommes.

Entre 1930 et 1955, les journaux locaux, conscients de leur responsabilité historique, publient de nombreux articles à propos de la dot, de la polygamie, du port du voile, de l’enseignement des filles, du droit de vote des femmes…


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LA BATAILLE DU VOILE

Au début du 20e siècle, le voile était synonyme de soumission. Il cristallisait toutes les batailles du moment. On y voyait une entrave à l’émancipation des femmes qui cherchent à se libérer de la poigne patriarcale. Habiba Menchari et Manoubia Ouertani sont les premières à publiquement ôter les leurs dans les années 1924 et 1929, scandalisant ainsi les conservateurs qui déplorent les signes évidents de l’instruction des femmes et de l’influence de l’Occident. La lutte vestimentaire faisait son apparition.

Paradoxalement, de nos jours, le port du voile, est devenue une revendication féministe, au même titre que sa suppression. Je ne m’alignerai donc pas avec ses détracteurs, bien que je comprenne certaines reserves. Certaines personnes y voient, un signe de soumission de la femme et une wahabisation de notre société. Je pense que la bataille du voile devrait être la nôtre avant d’être celle des obscurantistes. Il s’agit, avant tout, du droit de la femme, de disposer de son corps (et en l’occurrence de son look vestimentaire) sans avoir à supporter le poids d’une opinion externe. Certainement pas celle d’un éventuel mâle qui l’obligerait à se couvrir le chef. Le port du voile, ou non, est un choix, qui doit absolument être libre. Veillons à ce qu’il le reste. Toute autre considération n’est que verbiage.

LA RÉVOLUTION DU 14 JANVIER 2011

Après la chute du régime novembriste, il y a eu un retour massif des exilés politiques. Ils appartenaient, essentiellement, au mouvement des frères musulmans. Une vague conservatrice a frappé le pays de plein fouet. Ou peut-être n’a-t-elle fait que réveiller un troll endormi? De multiples ONG féministes et humanistes, ainsi que la société civile, se sont organisées pour résister à toute régression possible. Elles se sont battues, pour lever les réserves de l’État, à la convention des Nations Unies. Mais aussi pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Elles ont milité pour la constitutionnalisation des droits des femmes et exiger une nouvelle Constitution démocratique et égalitaire. Est-ce à dire qu’il y a de quoi se rassurer ?

Rien n’est moins évident. La lutte continue!


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