La Table de Jugurtha est une montagne du Nord-Ouest de la Tunisie qui porte le nom du célèbre guerrier numide. Située sur le territoire de la municipalité de Kalaat Senan (gouvernorat du Kef) à 230 km de la capitale Tunis et à 6 km de la frontière algérienne, ce rocher fortifié est un plateau de 80 hectares, à une altitude de 1200 mètres. Ses falaises, tombant à pic, ont fait de ce lieu un refuge idéal pour échapper à l’ennemi.
Son accès n’est possible que par la face Nord, par un chemin étroit, creusé dans une faille. Des traces de sabots sont encore visibles sur ces pierres. Tout indique que ce lieu fut une cité primitive. On y découvre des galeries utilisées comme greniers, des restes d’habitations, une fortification, des bassins creusés dans la roche pour retenir l’eau de pluie et une végétation suffisante pour nourrir le bétail.
Tout laisse penser que l’homme peut y vivre en autonomie durant une longue période. Ses falaises calcaires décrivent un relief montagneux d’une forme quasi ovale de quatre kilomètres de pourtour. On y trouve une mosquée placée sous la protection de Sidi Abdel Daoued qui abrite dans sa cour le tombeau de Brahim Bou Aziz, ancien caïd des Hanencha.
En 533, la plaine sert ainsi de refuge au dernier roi vandale Gélimer pourchassé par les Byzantins. Trois ans plus tard, elle sert de lieu de regroupement de l’armée rebelle de Stotzas qui s’oppose au patrice Solomon. En 647, c’est sur la Table que les habitants, vaincus par les Arabes, se retranchent. En 686, à nouveau, les tribus berbères y trouvent refuge après la mort du roi Koceila. Pendant le X ème siècle et le XI ème siècle, la plaine est un refuge pour les premiers Fatimides. Puis pour les Zirides. En 1283, l’émir hafside de Bejaia Abû Faris y est tué par l’usurpateur Ibn Abi-Umara. Les survivants de la bataille trouvent refuge sur la montagne. 1352. L’émir hafside Abû Ishâq Ibrâhîm al-Mustansir y est vaincu par les rebelles.
En 1644, Hammouda Pacha Bey vainc le cheikh des Hanecha, des rebelles dont la Table était l’une des places fortes. Puis en 1694, Hussein ben Ali, soupçonné de trahison par les Mouradites, s’y réfugie avant de devenir maître de la régence de Tunis. Au XVIII ème siècle, la Table aurait servi de refuge au brigand Senane, d’où le nom de la ville actuelle de Kalaat Senan (« fort de Senan »). Au XX ème siècle, les Français y établissent une mine, désormais abandonnée.
En août 2017, le ministère des Affaires culturelles entame les premières démarches pour inscrire la Table de Jugurtha sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Il remet officiellement le dossier de candidature le 28 septembre 2017 au siège parisien de l’organisme. On a annoncé le projet d’ouverture d’un musée consacré au site dans l’enceinte de l’ancien palais présidentiel de Bourguiba. Et on prévoit également de fournir dans l’année qui suit un second dossier axé sur la valorisation et l’aménagement du lieu.
Jugurtha ainsi que toute la région du nord-ouest tunisien demeurent malheureusement méconnus. Mais les ouvrages consacrés aux thèmes commencent à voir le jour. Et de très nombreuses excursions permettent de découvrir ces lieux riches en histoire.
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Par Firas messaoudi